Défi d'écriture dans la salle de torture!

Et voici les résultats

 

La petite histoire de La Fuente

Caro fit jouer sa main droite sur les plumes qui dépassaient de son carquois. Sans la regarder, elle sélectionna une flèche et vint la pincer sur sa corde. Droite comme un i, elle ne bougeait quasiment pas. Sa respiration, callée sur les légères rafales de vent qu'elle entendait à l'extérieur, ne faisait aucun bruit. Son bras tendu, ferme comme une branche de chêne, tenait l'arc en direction de l'entrée du hall.

La lumière ne filtrait que difficilement à l'intérieur du vieux bâtiment. C'avait été un hôtel, Avant. Aujourd'hui, ce n'était plus qu'une ruine poussiéreuse, et dont la mousse et les plantes grimpantes avaient recouvert la façade. Les fenêtres supportaient une couche de crasse et de pollen telle qu'il n'aurait pas été possible de distinguer quoi que ce soit à travers, et c'était sans compter les branches de lierre et de rosiers sauvages.

Le hall faisait une dizaine de mètres de côté. La porte d'entrée, fracassée, béait, seule source de lumière. Le soleil illuminait les grains de poussière qui voletaient aléatoirement dans l'air frais. A l'opposé, un comptoir délabré et derrière lequel Caro attendait patiemment. Cent quarante-deux secondes. Elle comptait dans sa tête, sans réfléchir, pour garder sa concentration totale.

Le rôdeur qui la suivait devrait forcément passer par là. Elle était presque certaine qu'elle ne l'avait pas semé. Elle huma l'air et sentit l'odeur de sa propre transpiration. Elle savait qu'il la sentait aussi, et probablement plus précisément qu'elle.

Deux cent secondes. Un craquement se fit entendre au delà du porche. Des débris de verre avaient crissé sous quelque chose de lourd. Probablement quelque chose comme un pied. Une silhouette se découpa dans l'entrée et un battement de cil plus tard, elle vacillait, une flèche dans le front. Elle lâcha une série de gargouillis, toujours debout, puis s'écroula dans un bruit sourd, faisant tinter d'autres éclats de fenêtres cassées.

Caro s'accorda quelques secondes d'immobilité, tendant l'oreille. Aucun autre bruit que sa respiration angoissée et celui du sang qui giclait de la plaie par petites saccades répugnantes. Son bras, laissé trop longtemps tendu à hauteur d'épaule, tremblota, lui rappelant qu'elle n'aurait pas tenu très longtemps dans cette position. Elle l'abaissa presque au ralenti, puis se passa l'arc dans le dos, la corde contre sa poitrine. Elle sorti un petit poignard, qu'elle laissa plaqué contre sa cuisse alors qu'elle avançait vers le cadavre. Arrivée à son niveau, elle vérifia que la flèche avait bien fait son travail.

Le rôdeur avait été une femme, avant d'être infecté. Ses yeux étaient voilés d'un gris pâle, inexpressifs. Sa peau était presque blanche, ses veines bleues. Une bonne partie de ses cheveux étaient tombés. Une grosseur purulente lui remplaçait la nuque, et il en sortait régulièrement de minuscules araignées au corps presque translucide. Sans les toucher, Caro récupéra son projectile et le nettoya sur la veste de sa victime. Elle lui fit rapidement les poches mais sans rien y trouver.

Maudissant la Vermine, elle se redressa, et éclata l'énorme tumeur d'un coup de botte, ce qui répandit une large trainée de pus, de sang et de petites araignées paniquées.

Faisant lentement dépasser sa tête par la porte, Caro surveilla la rue. Les environs semblaient désert. Elle longea les immeubles abandonnés et envahis par la végétation jusqu'à une petite ruelle discrète recouverte par des saules sauvages. Elle écarta les branches d'un buisson dense et en extirpa son VTT.

Elle enfourcha le vélo et partit plein ouest, le soleil dans le dos, sans un regard en arrière.

 

***

 

Une heure plus tard, elle arrivait aux pieds d'un ancien HLM. Une tour carrée, d'une douzaine d'étages, que la végétation avait curieusement évitée. Elle traversa un ancien parc et alla installer son vélo dans ce qui avait été une espèce de faux bateau de pirates. Les enfants d'avant pouvaient y grimper ou y jouer à cache-cache. Les enfants d'aujourd'hui ne jouaient plus guère. En y pensant, Caroline se rendit compte qu'elle n'avait pas vu d'enfants depuis plusieurs années. Depuis la mort de Lily.

Elle décrocha les sacs qu'elle avait sanglé à l'arrière du VTT et les hissa lourdement sur ses épaules. Elle passa devant l'entrée principale de l'immeuble, contourna le bâtiment et trouva la petite porte de la loge du gardien. Elle exécuta le mot de passe à l'aide de son poing.

 

"Combien de pattes ?

-Neuf. Ouvre, c'est moi."

 

Plusieurs cliquetis se firent entendre, étouffés, de l'autre côté de la porte, puis elle s'entrouvrit timidement. Le vieux Dimitri jeta un coup d'œil à Caroline, l'examinant de la tête au pied. Celle-ci, fit un tour sur elle-même, les bras levés.

 

"Entre."

 

Elle passa la loge et monta directement les escaliers qui menaient au couloir du premier étage alors que Dimitri refermait derrière elle. Toutes les portes des appartements étaient ouvertes et silencieuses. Caroline se retourna vers Dim, qui remontait avec elle.

 

"Où sont les autres ?

-David et Emma sont partis chercher du bois, Dany est en haut, et les autres, je n'ai pas bien compris. Ils se sont préparés et sont partis il y a deux ou trois heures. Apparemment pour retrouver Lily."

Caro lâcha ses sacs, soudain fatiguée.

"Lily est morte.

-Je sais."

Elle secoua la tête.

"J'espère qu'ils ne prendront pas de risque et qu'on les reverra vite."

Dimitri ne dit rien.

"J'ai trouvé des conserves, du riz, et j'ai même une tablette de chocolat. Je vais monter tout ça.

-Laisse, je m'en occupe".

Caroline n'objecta pas. L'épuisement la rattrapait. Elle hocha la tête, laissa les sacs aux pieds de ce bon vieux Dim et se rendit dans son appartement. Elle avait récupéré le 104, deux chambres, une salle de bain et une grande cuisine qui n'étaient plus alimentées en eau depuis longtemps, et la vue sur le parc avec, au loin, la triste banlieue, maintenant recouverte de végétation qui commençait à jaunir avec l'arrivée de l'hiver.

Elle s'écroula sur son lit.

 

***

 

Elle fit de drôles de rêves, noirs, dérangeants. Elle se réveilla avec un poids sur le cœur. Elle mit un peu de temps à réaliser qu'il faisait nuit noire. Seule une petite lueur se dégageait du couloir, venant sans doute d'une bougie.

Caro s'assit sur le côté du matelas et se frotta le visage. Elle n'avait pas l'impression d'être reposée. Pire, elle ressentait une espèce de tension, une inquiétude pesante, fatigante. Pourquoi est-ce que les autres étaient-ils partis chercher Lily ? Elle se rendit compte que c'était cela qui la faisait se sentir mal.

Lily était une fillette de huit ans. La seule du groupe. La fille de Greg. Elle avait disparu, une nuit d'été, il y avait quatre ou cinq ans. Peut-être six, difficile à dire. Des traces de lutte avaient été trouvées près de son lit, mais personne n'avait rien entendu. On avait aussi retrouvé de la toile.

De temps en temps, Greg pleurait, seul dans son appartement qui était le voisin de celui de Caro. Mais il ne parlait plus de sa fille. Il essayait d'être fort, devant les autres membres du groupe. Et il y arrivait plutôt bien. Mais il lui était déjà arrivé de craquer. De vouloir partir à la recherche de Lily, contre tout espoir.

Les autres avaient du le suivre. Les idiots. Il valait mieux se raisonner, accepter que Lily était morte, et avancer. Maintenant, ils mettaient en danger tout le groupe en montant une expédition hasardeuse, et plusieurs années après sa disparition ? Une connerie. Et pourquoi n'avaient ils pas attendu le retour de Caro ? Ils n'en avaient même pas parlé, la veille.

Elle se leva et sortit. Le couloir, silencieux, dansait au rythme de la petite flamme. La bougie était bien entamée, il devait être tard. Ou tôt.

Caroline se dirigea vers l'appartement de Dany, sans doute dans l'idée de lui demander des explications, mais croisa le vieux Dim dans les ombres.

"Tu ne dors pas, petite Caro ?

-J'ai un peu de mal, ce soir. Tu as des nouvelles des autres ?"

Le vieil homme fit non de la tête, à peine perceptible dans le noir.

"Je te raccompagne à ta chambre ?

-Non, merci, je voulais parler à Dany.

-Dany est parti aussi.

-Quoi ?"

Elle avait parlé fort, presque crié. Elle avait l'impression d'être la victime d'une mauvaise blague. Tout le monde ne pouvait pas quitter la planque, comme ça, sans la prévenir. Il y avait des règles, on était plus Avant, on était après la fin des temps, on était à l'époque de la Vermine, on était soudé, on respectait les consignes de survie, où on...

"Nous sommes seuls, Caro."

La bougie vacilla, ce qui les éclaira l'espace d'une seconde. Caroline eut tout juste le temps devoir le sang, sur les mains et la chemise de Dimitri. Elle fit un pas en arrière.

"Il n'y a plus que nous deux. Ne cherche pas à t'en aller, toutes les issues sont condamnées."

Caroline se retourna et se mit à courir. Elle entendit à peine le vieux crier dans le couloir : "Juste nous deux, Caro !". Elle entra en trombe dans son appartement, cherchant des yeux son arc. Il n'était nul-part. Elle palpa ses poches, trouva son poignard et se retourna vers la porte, la lame levée. Elle n'y voyait presque rien. Elle ne distingua pas la silhouette inquiétante de Dimitri, mais entendit ses pas et son souffle aigu.

"Qu'est-ce que tu as fais aux autres ?

-Je les ai offerts. Offerts à la Reine !

-Tu les as tué !

-En quelque sorte. Mais leur sacrifice n'a pas été vain, petite Caro. Grâce à eux, j'ai pu négocier notre survie à tous les deux. Nous allons pouvoir rester ici, toi et moi, en sécurité, protégés par la Reine et ses Enfants. Toi et moi. Juste nous deux, Caro.

-Tu as négocié ? Avec la Vermine ?"

Elle parlait pour distraire son attention, et d'un coup, sans prévenir, donna une impulsion et se projeta en avant, la lame la première. Elle ne rencontra que du vide, là où aurait du se trouver la voix de Dim, et chuta maladroitement.

"Ne lutte pas, tu n'en as plus besoin. Nous sommes en sécurité maintenant." La voix venait d'ailleurs, d'une autre ombre.

Caroline jura, à terre, les larmes lui montant aux yeux.

"Tu les a tous tué ?"

La voix éraillé du vieillard eut une hésitation.

"Je n'ai pas tué Lily."

Caroline serra les dents et se remit sur pied d'une bourrade rageuse. Elle s'élança dans le couloir, les battements de son cœur couvrant le rire mauvais qui s'élevait de sa chambre. Elle traversa tout le premier étage, réfléchissant. Avait-il réellement condamné tous les accès ? Il n'avait pas pu couvrir toutes les fenêtres. Elle entra dans un des appartements inutilisés, au fond du couloir. Les vitres crasseuses n'étaient pas barrées. Elle se précipita, ouvrit la première fenêtre qu'elle pu atteindre, et se prépara a enjamber le rebord, sans réfléchir. Le premier étage n'était pas haut, elle pourrait se laisser tomber sans se casser quoi que ce soit.

Sauf qu'elle ne pouvait pas. Ses bras étaient bloqués. Son torse tout entier ne pouvait plus bouger. Elle s'était prise dans une toile. Une de ces toiles si fines que l'œil avait du mal à les voir. Surtout la nuit. Elle connaissait ce piège, l'avait évité un paquet de fois. Elle se débattit, mais arrêta très vite, consciente que cela ne ferait qu'empirer sa situation.

Derrière elle, elle entendit les bruits de pas et le petit rire sadique.

"Arrête de courir, petite Caro."

Elle ne pouvait même pas tourner la tête, si bien qu'elle ne voyait pas Dimitri.

"Tu es contaminé, Dim, tu vas devenir un rôdeur, comme les autres !

-Tu te trompes. J'ai pactisé. La Reine est mon amie, désormais. Elle n'a pas besoin de pondre en moi. Et tu auras la même chance. Si tu arrêtes de te débattre comme une mouche. Tu apprendras à apprécier la Reine et ses Enfants.

-Espèce de malade."

Des larmes ruisselaient sur les joues de la jeune femme. Elle tenta une dernière fois de secouer ses bras, mais la toile était trop bien accrochée. Elle sentit une main à la peau rugueuse, encore humide de sang, lui caresser les cheveux.

"Juste nous deux, Caro."

 

***

 

Cela fait huit mois que je suis prisonnière. Dim ne me fait pas de mal. Il n'a même pas essayé quoi que ce soit. Je pense qu'il ne veut juste pas être seul. Il parle, sans arrêt, même quand je ne réponds pas. Il a l'air de se satisfaire de la situation. Plusieurs fois, j'ai hésité à l'étrangler. Mais il a vraiment réussi à pactiser avec la Vermine. Les bêtes nous ignorent. Je l'ai vu approcher une araignée de près d'un mètre de diamètre, et elle ne lui a rien fait. Si je veux rester en vie, je ne peux rien contre lui.

Aujourd'hui, j'ai allumé une bougie pour chacun des membres du groupe que Dim a assassiné, offerts à la Vermine. J'essaye de le faire tous les mois. Pour ne pas oublier. La dernière bougie est pour Lily. C'est peut-être mon dernier espoir. Si elle n'est pas morte. Si elle veut retrouver son père. Peut-être qu'elle pourrait m'aider. Mais il vaut peut-être mieux me raisonner, accepter.

 

Peut-être qu'espérer est une connerie.


La petite histoire de Tom Puce

Les esclaves de la peur

 

 

              Le vent souffle sur la plaine. Il souffle en bourrasques cinglantes, comme il l'a toujours fait à cet endroit reculé du continent où seuls quelques fermiers improvisés ont eu l'audace de venir y poser pâturages et cultures.

Mais n'allez pas vous méprendre, ils ne sont pas là par hasard, ni même par choix .

Certes, le lieu est paisible d'apparence et ce n'est pas Abhaïd, la doyenne des cultivatrices qui irait propager quelques doutes sur le sujet dans le hameau. Non ! Chacun ici profite du chant des oiseaux, du roulis des charrettes à grains, des merlins fendant l'air et le bois..... erreur au milieu de ce paysage vide, cet amas informe de granges sommaires et d'habitations de fortune évolue dans un calme anormal.

 

 

Abhaïd se trouve dans la partie la plus au nord des champs, dans la zone réservée aux silos de stockage et aux remises. Seule, comme chaque jour, elle charge dans sa petite carriole des tonneaux de fruits et de légumes . La moitié à peine lui reviendra. Elle fait une pause et enveloppée du silence ambiant des plantations, regarde pensive l'horizon. Elle entrouvre ses lèvres .

 

« Là-bas, au loin, il y a le bruit ».

 

Cette phrase elle la répète souvent, elle la susurre, tel un mantra ou une comptine dont elle en aurait oublié la suite mais qu'elle se récite sans relâche pour une raison qui lui est propre mais qu'elle seule connait .

Là-bas, au loin, il y a le bruit.... Celui des batailles dont elle ne sait que très peu mais pour lesquelles elle doit faire tant.

Du jour qui a marqué l'arrivée des gens armés dans la région, jusqu'à l'instant présent, plus personne n'a vécu pour subvenir à ses propres besoins, mais à ceux du Maitre Inconditionnel, comme il se fait appeler, et de ses troupes.

Il y de cela bien des années, à une époque où Abhaïd terminait tout juste son apprentissage des rudiments du travail de la terre et où la volupté de ses courbes commençait à peine à transparaître, un homme noble s'est présenté en qualité de dirigeant dans toutes les communautés autonomes qui bordaient les collines, pour proclamer son droit sur les populations y vivant, démanteler leurs battisses et les délocaliser dans la plaine. Et, bien que n'ayant encore aujourd'hui aucune idée précise du sens des mots « noble » ou « dirigeant », ces populations ont courbé l'échine sans protestation face aux lames et mousquets de ces géants tous d'argent vêtus et suivi leurs ordres pour ainsi reconstruire leurs maisons où il leur fut sommé de le faire .

Tout le monde est éleveur ou cultivateur maintenant . Il n'y a plus de soigneurs, plus de tisserands,plus de forgerons.... Chacun doit se débrouiller par ses propres moyens pour ces affaires là, mais doit en outre participer à « l'effort de guerre » en fournissant de la nourriture, et quelques faveurs sexuelles occasionnelles, leur a-t-on dit.

Pour ce qui est du terme « effort », Abhaïd n'en connait que trop bien le sens mais pour ce qui est de « la guerre », l'unique représentation qu'elle peut s'en faire lui vient des paroles du Maitre Inconditionnel. Rien que de penser ce mot, cela lui provoque sueurs froides et pâleur alors elle se dit bien contente qu'il n'y ait plus d'école pour apprendre au gens les définitions. Mais de ce qu'elle semble avoir retenu des discours du Maitre, il s'agirait d'une histoire avec un autre noble ayant eu l'impétuosité de ce proclamer lui aussi grand Maitre Inconditionnel, de l'autre côté des collines. Un usurpateur qui ne serait en réalité qu'une créature démoniaque, reptilienne et dévoreuse d'enfants, ayant pris forme humaine, ce faisant appeler Boritt VonGruken et maîtrisant la langue locale. Un tirant! Une abomination!

Ainsi des batailles sans merci ont donc lieu plus bas, à l'entrée de la vallée qui fait frontière entre le nord et le sud du continent, pour repousser cette menace à l'humanité .

Le passage préféré de tous, celui qui recueille le plus de vivats dans ces discours étant celui décrivant la volonté du dirigeant à protéger jours et nuits ses ouailles au détriment de son sommeil et le fait qu'il quitte sa position de rempart sur le champ de bataille uniquement pour venir s'enquérir de leur état de santé, le tout enrobé ça et là d'envolées lyriques au sujet des pouvoirs qui lui ont été confiés par Le Divin.

La doyenne ne l'a cependant que très peu vu faire d'apparitions publiques, et ce ne sont que rarement les mêmes soldats à venir prélever la moitié des récoltes leur étant due ,tout comme les allocutions hebdomadaires ne sont faites que par des subalternes .Mais c'est mieux ainsi, car comme elle le dit souvent : « si des coyotes venaient s'en prendre à moi , ne serais-je pas mieux dans une maison que juste dans une armoire? ».Elle préfère que son rempart creuse le plus possible la distance entre elle et son coyote.

D'un autre côté ça fait bien longtemps qu'elle n'a pas vu de coyotes ou même de carnivores dans la région. Elle doit assurément se dire que le Maitre veille vraiment sur tous les dangers ou que les troupes de chasseurs, dont elle a vaguement entendu parler, y sont pour quelques affaires.

Soit, de toutes les manières elle n'a plus goût à la viande. Elle n'y est plus habituée et en est sevrée, tout comme son peuple, depuis trop longtemps pour y revenir. La chaire ne revient qu'aux guerriers et les herbivores ont un but tout autre dans leur nouvelle culture :

Les vaches ont disparues au profit des chèvres, moins nécessiteuses en terme de place et d'entretiens pour la plupart de ces paysans peu adroits, pour produire le lait.

Les porcs se nourrissent du trop plein de déchets et produisent de l'engrais pour les plantes.

Les chevaux ont tous été réquisitionnés pour les garnisons armées et au vu du nombre décroissant d'unités montées visitant le camp, il est à gager qu'une extinction progressive de l'espèce ne soit inévitable. Ils ont cependant été remplacés en dehors des champs de bataille par les Brebis et les béliers, qui sont attelés aux chariots, permettent le labourage des champs et l'activation des mécanismes de certaines machineries que même les vents violents de la région n'arrivent pas à entraîner et, sellés, peuvent être montés par les humains. Pour cette raison, les ovidés prolifèrent abondamment dans la région et leur musculature a connu un développement phénoménal au fil des ans.

Sans son brave mouton, Abhaïd ne pourrait pas tirer sa belle carriole, elle le sait bien et, pensive, le regard toujours porté sur l'horizon, elle murmure à nouveau.     

 

« Là-bas, au loin, il y a le bruit »

 

  Là-bas, au loin, il y a le bruit. Plus loin encore il y a nombres de hameaux pareils au sien. Elle en est certaine. Peut-être se dit-t-elle également qu'il a une Abhaïd aussi, avec une belle petite charrette comme la sienne, tirée elle aussi par un mouton et que tout comme elle, au même instant, son double charge des tonneaux pour le démon qui règne sur l'autre armée.

Les seuls réels signes d'émotion qu'elle laisse transparaître aujourd'hui lui viennent de ses pensés envers cette Abhaïd de l'autre versant des collines et c'est d'ailleurs pratiquement devenu son unique raison d'ouvrir la bouche pour s'exprimer. Heureusement que le vrai Maitre Inconditionnel est un humain et même un humaniste va-t-elle jusqu'à dire. Elle serait perdue sans cette personne de grand cœur pour les protéger tous et les aimer . En plus, lui il ne mange pas d'enfants conclue-t-elle régulièrement ses monologues et cela, même s'il n'y a plus vraiment d'enfants ni même de naissances de part chez elle de toutes façons.

Elle époussette négligemment sa tunique et regarde son chargement. Elle prend sa respiration pour parler:  

« Bon on en a assez pour ce voyage. Et on chargera moins sur le prochain .Qu'est-ce que tu en dis? »

Comme elle a pris l'habitude de la faire, elle s'adresse à moi et approche sa main pour me toucher. Je dois agir normalement. Je dois lui repondre:

« Beeeeh!  (je te déteste pourriture humaine ! ) »

Elle me caresse. Comme si la vu de sa pathétique existence ne me donnait déjà pas assez la nausée.  

« Mais oui, c'est bien Babouche »

« meeeeeeeh meaaah! (nous ne sommes qu'un, nous sommes légion, nous n'avons pas de nom. Je souhaite que tu brûles!) »

« Comme tu dis! Allez on rentre. De toute façon les soldats viennent de moins en moins souvent. Ils doivent avoir assez à manger et nous on est de moins en moins nombreux ici. Alors on en a assez fait pour aujourd'hui »

Les humains ne comprendrons jamais les subtilités de la langue des moutons. Babouche n'est qu'un nom stupide que les humains me donnent, au même titre que le terme mouton, cette désignation réductrice utilisée pour me catégoriser, est un affront envers mon noble peuple.

Depuis des années nous les observons, les analysons et les manipulons en leur laissant croire à notre servitude. Ils nous appellent « moutons » mais ce sont eux les moutons. Ce sont eux les esclaves.............leurs propres esclaves.

Abhaïd m'entraine en direction des réserves, la charrettes à ma suite. Elle ne réalise vraiment pas à quel point le monde peut être plus complexe qu'il n'y paraît .Plus tard elle ira se coucher, comme chaque fois, après la tombée de la nuit pour se réveiller aux premières lueurs du jour, pour accomplir les mêmes tâches pour les même personnes, sans aucune conscience de leur futilité dans la course pour endiguer l'obsolescence de la race humaine. Leur peur de disparaître les a déjà conduite à la division de leur démographie de moitié en quelques années et un jour proche, les seuls survivants restants seront tellement affaiblis qu'ils ne nous verront pas frapper. Laissons les juste encore un peu s'entre-tuer et s'affamer et mes semblables et moi nous occuperons d'écraser les restes.

Abhaïd est d'un âge avancé pour une humaine, elle aura déjà surement rejoint ses ancêtres quand cela arrivera. Ses pas sont lourds dans la boue, son souffle peine à reprendre son rythme d'antan, ses yeux doivent se plisser pour lui laisser apercevoir plus nettement le chemin. Le vent qui souffle perpétuellement ici n'est pas plus fort, c'est elle qui l'est moins. Elle lance un nouveau regard derrière elle, vers l'horizon .Des années en arrières une larme aurait coulée le long de sa joue et sa voix aurait été fébrile.

 

« Là-bas, au loin, il y a le bruit »

 

   Là-bas, au loin, il y a le bruit, qui s'amenuise. Plus loin, il y a des villages, désertés .Si vous poussez plus loin encore et tout autour, il y a des moutons, qui attendent, tapis dans l'ombre, prêts à prendre le pouvoir.

 

Le vent souffle sur la pleine.

Un vent nouveau.

Celui de la révolte ovine.

 

 

Fin

 


La petite histoire de Rouquette

 

TORTURE

L’armée des Pax devait libérer le prince, sans quoi, ce serait la fin de toute la civilisation Pax. Les ennemis les submergeaient. Ces parasites semblaient infinis et déferlaient sur la garde en des vagues incessantes. Seul Myrlorg réussissait à les tenir à distance en creusant leur rang de sillons ensanglantés.  Le fier guerrier à cheval sur son lézard de guerre progressait envers et contre tout. Si un seul devait triompher, ce serait lui. Le voir ainsi, manier sa magnifique hache avec une dextérité qui tenait plus de l’art que du combat, donnait du courage aux troupes. Le regard de Myrlog balayait impitoyablement les ennemis qui, lorsqu’ils croisaient ce regard de fer, perdaient de leur détermination et tendaient même à reculer d’un pas. Il les hachait alors comme des mauvaises herbes, comme des ronces qui le retenaient loin de son aimé monarque, le doux Magnio, que les Zgorgs tenaient entre leurs pattes répugnantes.

Myrlog, brûlait de rage. Comment ses viles créatures, ses êtres pathétiques, avaient-ils pu contourner sa vigilance et s’emparer devant son nez du gracieux Magnio ? L’être qui alimentait de son pouvoir tout son peuple, l’être qui leur permettait d’être tous reliés entre eux. S’il arrivait malheur à leur monarque, la civilisation Pax, sans ce lien, s’écroulerait. Elle serait semblable à celle de tous ces peuples barbares dont les mots déformaient la pensée et parasitaient tout échange. Myrlog répugnait normalement à blesser une créature vivante, mais il n’était plus lui-même, il n’était que colère et voir les corps insectoïdes de ses ennemis voler en éclat autour de lui le mettait dans une joie sans limite. Il tranchait, encore et encore, dans cette horde infinie. Il bloquait les pensées des autres soldats hors de lui. Il n’avait pas le temps d’écouter leurs souffrances et leurs peurs. Myrlog leur envoyait sa rage de toutes ses forces pour qu’elle obscurcisse tout, emporte tout le reste et qu’ils ne soient plus que leurs armes, du fer et du sang. C’était tout ce qui comptait à ce moment-là.

Il s’élança encore plus vite, il sentait que le temps était compté, l’appel de Magnio lui parvenait encore comme un tiraillement douloureux qui alimentait encore plus sa haine et sa rage. Il frappa en grands coups dans les lignes ennemis, devint un tourbillon mortel. Il s’arrêta lorsqu’il sentit que seul l’air était coupé par sa hache. Il ouvrit les yeux mais ne vit que du sang. Il le balaya d’un revers de main et compris pourquoi plus personne ne l’affrontait. Les Zgorgs lui avaient envoyé l’artillerie lourde. Il faisait face à une mante religieuse de trois mètres de haut. Il n’eut que quelques secondes pour réagir alors que les pattes de la bête, aiguisées comme des lames de rasoir, descendaient sur lui pour le découper. Il para de sa hache qui se brisa sous le choc et il fut violemment projeté au sol. Il se releva. Pour son bien-aimé prince il terrasserait cette monstruosité, et ce, à mains nues s’il le fallait.

Pendant ce temps-là dans la salle des machines

Le scarabée géant s’affairait à brancher des tubes et des fils autour de lui. Le prince ne pouvait pas bouger, des liens de cuir retenaient ses bras, ses jambes et son cou. Il regrettait de ne pas avoir la force de Myrlog, le chef de sa garde. Pourquoi donc les Anciens avaient mis un pouvoir si grand dans une enveloppe si faible ? Il savait que c’était une question stupide, seule sa famille, de par son sang bleu, pouvait servir de conducteur au pouvoir et relier les ondes psychiques de son peuple pour que tous puissent communiquer télépathiquement. La tentative de ce Zgorg de lui voler son pouvoir, serait sûrement vouée à l’échec car il doutait que ces créatures puissent être le vaisseau d’une telle puissance. Ce pouvoir avait toujours été un grand fardeau pour lui, car il était le seul à ne jamais pouvoir bloquer les autres, à être constamment assailli par leurs pensées. Les Zgorg ne se rendaient pas compte de la contrepartie de son pouvoir. Ils n’y voyaient qu’un avantage stratégique : en dépouillant les Pax de leur cohésion mentale, leurs défenses ne vaudraient plus rien, surtout contre une armée qui serait, elle, unie par la pensée. Cela faisait des années que les Zgorg convoitaient en vain les terres fertiles et l’accès au grand fleuve des Pax.

Zirg regardait le frêle humain qui était à sa merci, harnaché au milieu de la monstrueuse machine. Cela le peinait de faire du mal à une créature si démunie mais c’étaient ces mêmes humains qui avaient chassés son peuple, il y avait de ça des milliers d’années, de leur terre et c’était encore eux qui avaient, en ces temps reculés, tué impitoyablement reines et larves. Il était temps de leur rendre la pareille. Ce pauvre humain avait beau être innocent, il était la clef d’une justice qui avait été trop longtemps repoussée. Zirg était fier de son invention. L’immense salle souterraine avait peine à contenir tous les câbles et les tuyaux nécessaires au bon fonctionnement du transfert. Cette machine était le résultat d’années de recherche, d’années de haine contre ceux qui, par un don inéquitable du ciel, avaient pu piétiner un peuple et les pousser à vivre dans un désert aride et inhospitalier. Sa haine et sa rancune remplacèrent le bref éclair de compassion qu’il avait eu pour l’humain. Il allait drainer son pouvoir et le donner à son roi. Enfin son peuple retrouverait sa terre promise, son dû.

Il alluma la machine, des cristaux magiques s’allumèrent, l’accumulateur se remplit grâce à l’énergie solaire, le liquide de refroidissement se fit entendre dans les tuyaux qui parcouraient la salle, les rouages se mirent à tourner d’une douce musique métallique. La magnifique machine serait bientôt prête. Il échangea un regard avec son roi qui, lui aussi, était attaché à l’étrange machine. Le sourire calme et plein d’assurance du roi finit de le conforter dans ses convictions. Oui, il était en train de faire ce qui était juste.

Pendant ce temps-là, devant le palais.

Un cri retentit dans le cerveau sonné de Myrlog. C’était son prince qui l’appelait, et il était là, impuissant, face à ce monstre immonde. Il n’en pouvait plus, le monstre l’avait poussé jusqu’à ses derniers retranchements. Il ne faisait qu’esquiver sans arriver à porter ne serait-ce qu’un seul coup. De toute façon que pouvait-il faire face à ce titan alors qu’il n’était armé que d’une dague ? La réponse lui apparut inexorable : « rien ». Il était perdu, son peuple était perdu. Et pourtant il ne renonça pas au combat. Il plongeait, esquivait et courait pour éviter les coups. Il entendit un nouveau cri dans sa tête, un cri plus désespéré, plus pressant. Ce cri lui déchira le cœur, le distrayant du combat une seconde et laissant l’occasion à la mante religieuse de le saisir dans sa mandibule, broyant ses os et lui arrachant un terrible hurlement, plus de rage que de douleur.

Alors qu’il était soulevé de terre, il dégagea son bras de la mandibule de la bête et enfonça sa dague de toutes ses forces dans le crâne triangulaire. Sous le choc la créature relâcha sa mâchoire. Myrlog se projeta hors de celle-ci et s’accrocha à une tige sortant de dessous les mandibules de la créature. Il se servit de cet appendice comme d’un balancier pour se projeter sur la tête de l’insecte et lui planter sa dague dans l’œil. Celui-ci éclata en une bouillie immonde. Le monstre se secoua violemment pour tenter de se débarrasser de ce nuisible. Le chef de la garde vola en l’air. Il se concentra pour oublier un instant son corps meurtri et réagir vite. Il vit sa monture qui était restée proche. Il la siffla et elle courut dans sa direction. Dans un choc terrible, qui lui rappela qu’une bonne partie de ses os étaient au moins fêlés, si ce n’est cassés, il s’écroula sur sa monture. Il rassembla ses forces et ordonna au lézard de courir vers la porte du palais des Zgorg.

Les Zgorg n’avaient pas l’habitude d’essuyer des attaques et avaient choisi de dépenser leurs ressources afin de rendre leur désert vivable plutôt que dans des dispositifs défensifs, c’est pourquoi la porte éclata sans peine sous la charge du lézard en armure de combat. Myrlog sentait que les cris de son prince se faisaient de plus en plus faibles. Peut-être que le processus avait déjà était entamé. Il pria pour qu’il ne soit pas trop tard. Il fit fi de ses os en miettes, descendit de sa monture et courut dans la direction où il sentait que son prince était. Aucun des gardes Zgorg n’était de taille contre lui. Ils volèrent tous en morceaux les uns après les autres sur son passage. L’appel diminuait de seconde en seconde, et le palais était un véritable labyrinthe. Il courut de toutes ses forces. Chaque respiration était un combat, ses poumons étaient en feu. Il ne continuait à courir que par la force de sa volonté. Une porte, un escalier, encore une porte, il attrapa un soldat avec un trousseau de clef et le força à ouvrir une autre porte. Le prince devait être dans une salle enterrée au tréfonds de la terre. Les escaliers n’en finissaient plus.

Dans la salle des machines.

Enfin le processus avait commencé, la salle tremblait et les lumières vacillaient. Il y avait tant de force dans le pouvoir du prince humain que toute la machine était ébranlée par la puissance de celui-ci. Les tuyaux étaient secoués et toute la salle tremblait alors que le prince perdait son pouvoir aspiré par les cristaux. Une fois les cristaux remplis, Zirg pourrait envoyer le pouvoir à son propre monarque qui pourrait alors mener le peuple des Zgorg à la victoire. Il n’était cependant pas tranquille. Il ne s’attendait pas à une telle force. Il craignait que les tuyaux ne tiennent pas et cette inquiétude éclipsait la beauté du spectacle qui s’offrait à lui. Le pouvoir du prince illuminait tous les tuyaux de lumière multicolore donnant à la salle une allure féerique et surnaturelle. C’était magnifique, comme si les murs étaient faits de lumière.

Myrlog

Quelque chose ne tournait pas rond, l’escalier tremblait et une lumière multicolore éblouissante l’éclairait. Myrlog accéléra ses pas. Les murs tremblaient de plus en plus. Des morceaux de pierre tombaient autour de lui et il peinait à voir à travers la poussière. La structure avait l’air de vouloir s’écrouler toute entière. Enfin il vit une porte qui se détachait dans la lumière. Elle était auréolée de cette étrange lueur multicolore et semblait flotter dans le mur. Il y était. Il accéléra le pas et donna un puissant coup d’épaule qui projeta la porte hors de ses gonds.

Salle des machines

La porte explosa et un soldat humain couvert de sang entra dans la pièce. La machine n’allait pas tenir, les cristaux étaient en train de se fissurer. Myrlog et Zirg eurent le temps d’échanger un regard quand soudain tout explosa en un gigantesque éclair multicolore. La déflagration de l’explosion les coucha au sol et ils s’évanouirent. L’énergie fusa dans l’escalier et se dispersa à l’extérieur comme un immense nuage de fumée se diffusant à grande vitesse sur toute la surface de la planète et pénétrant à l’intérieur de chaque être vivant.

Le pouvoir n’avait pas été destiné à servir une seule race et encore moins à être contenu dans une seule créature. Il avait été offert à tous afin que chacun puisse voir dans l’esprit des autres, se comprendre et vivre dans la paix et l’harmonie.

Les Anciens, cabales secrète humaine, en se l’appropriant, avaient déréglé l’ordre universel, donnant naissance à une ère de destruction qui n’avait générée que haine et douleur. Leur élite avait réussi, par des expériences cruelles, à transformer le sang d’un être humain en un conducteur pour le pouvoir. Ils l’avaient alors enfermé dans un homme et ils avaient décrété que chaque personne de cette lignée, capable de supporter le pouvoir, engendrerait la lignée des princes des hommes. Ils avaient fait des humains le peuple élu, justifiant ainsi leur soif colonialiste et avaient fondé ainsi leur empire de terreur sur les autres races. Les Anciens utilisaient aussi le pouvoir pour localiser et faire disparaître toute dissension au sein de leur propre peuple. Il leur suffisait d’exclure du lien télépathique l’élément séditieux. Celui-ci ne pouvait supporter longtemps d’être séparé du tissu rassurant et réconfortant du flot de pensées de ses semblables et finissait inéluctablement par se ranger dans les rangs.

Mais le règne de dictature des Anciens s’arrêtait enfin. Les graines de haine que les Anciens avaient semées, avaient mûri en une vengeance qui avait délivré le pouvoir de ses chaînes et rétablit l’équilibre. La haine avait annulé la haine et la paix était désormais possible.

 

Le jour suivant, lorsque les êtres vivants s’éveillèrent de leur coma et regardèrent dans les yeux de leurs ennemis, ils les comprirent et, au lieu de reprendre leurs armes, ils se prirent dans les bras les uns des autres et pleurèrent longtemps sur la stupidité de leurs ancêtres.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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« Beaaahh meeeah? (et si on essayait d'aller manger les blés pour changer?) »

 

«Mmm meeeeeeeeeeeeeeeeh (Je ne suis pas convaincu par l'idée que l'on puisse vraiment les digérer) »

 

« Meaah.Beah beah beah? (possible. Sinon on peut foncer dans ce pommier et tenter de manger ce qui tombe non?) »

 

« Meh mmeaaaah....... bbbbrrr! beeeaaeeeaah beaaeah! mmmah(il faudrait.......bigre! Il y a Babouche qui approche avec sa maitresse! Et il nous regarde en plus) »

 

« Bbbbrrr! beeeeeeeeeeh? Eaah ,Bbbbbeaah meaaah......bbbbe,bbbbe, beaaaheaah! (Bigre! Qu'est-ce qu'on fait? Non, il va encore nous rabâcher ses inepties au sujet de la domination présumé de notre espèce et de sa révolution fantasque....... vite, vite, fait semblant de brouter!)

 

 

 

Abhaïd m'entraine en direction des remises, d'où j'aperçois subtilement des représentants de ma race. Deux des plus fières béliers du continent .Nul besoin de communiquer directement avec eux car mes sublimes congénères et moi sommes connectés en permanence. Le plaisir de la communication simple n'ayant pour autant pas disparu, en me rapprochant, je me permets cependant de les alpaguer.

 

 

 

« Bbeaaah, meaahmeaaah! (force et gloire à nous tous, mes augustes comparses!) »

 

« breah breah,meeh, meehh....bah (oui oui, c'est ça, force et …....tout ça ) »

 

« beeeahhabbeaaaah! Bbeah, meaaah? (à demain mirifiques frères! Peut-être sera-ce enfin le jour de notre avènement tant attendu , qui sait?) »

 

« Beah..... Meee......heahea......... (Sûr.... Je me sens …..tellement fort et glorieux aujourd'hui....) »

 

 

 

Je continu ma route plein d'espoir pour l'avenir . Leurs regards téméraires me font prendre conscience que nous sommes enfin prêts pour l'assaut sanglant qui nous est promis......

 

 

 

« Beeeah.... (psychopathe......) »

 

« Mm, Beeeah..... Beeaaaaahbeeh maeaaah? (ouais, psychopathe.....Bon et sinon pour ce pommier?) »...

 

 

 

 

 

..................fin?..........................